La guyane est propice aux élucubrations...
15/07/2010
Etendu sous la chape moite
Oscillant sous la trappe humide
J'entends les gouttes disparates
Le roulement aigu qui sape, limpide,
Le sommeil alangui par l'usure
D'un mois de pluie qui perdure.
Etendu sous la nappe fluide,
Balançant au son d'une harpe adroite
J'entends les doutes acariâtres,
Les tambours pointus qui happe, l'hydre
Du réveil amoindri par l'odeur
D'humus pourri, terre d'humeur.
16/07/2010
Les grillons grésillent, grivois.
Gouttes à gouttes, guilleret,
Gloute puis gloute, guindées.
Glapissent les goitres, gorilles ?
Garrigues ? Nenni ! Goguenard
En exergue, l'Amazonie ! Gloire !
17/07/2010
La boue moutonne, brune silhouette,
Molle carapace au lit d'un fleuve
Teinte ocre ou noire, à l'oeuvre
La boue, théâtre d'aviaires marionnettes.
L'écume, filet de baves jaunâtres,
Dissimule, impavides, les gros yeux.
Puis l'empreinte effilée des becs curieux,
Ibis, bihoreau, aigrettes albâtres.
Le ballet chaotique suit la marée.
les ombres incandescentes sont libérées
La magie d'une rive, au gré, palpite
Jusqu'au soir, le contre jour hésite.
18/07/2010
La brume, légère, volutes fantômes
S'insinue, matinale, entre les cimes et les dômes
La lisière s'épaissit, sylves enfumés
L'aube s'élargit clair obscur allumé.
Les libellules dansent, effrénées
Pépiement, trilles, alarmes, vols planés
Sarabande au rythme tropical
Libérant le jour de son silence monial
19/07/2010
Un pas après l'autre, aux aguets,
J'ai suivi la sente étroite,
Une ligne forestière pour le chat margay,
Entre les arches, les lianes droites.
Intimidés par les sombres verts, forêt secondaire
J'ai contourné les arbres cathédrales,
Esquissé un regard dans les trouées opales,
Marche funèbre dans cet édifice sans hiver.
Là un pilier à échasse, des racines contrefort,
Ici un ligneux étrangleur sans effort.
Je m'insinue dans le ventre pourrissant,
Sous le manteau, la terre et son sang.
20/07/2010
A ciel ouvert, il reste les murs,
Ocres, lézardés, suintant l'eau.
Le fer, rouilles anciennes des barreaux,
Cellules, confinées sous un ciel pur
Une tenue pour mourir, cimetière
Des enfants, des gardes, les bagnards à la mer.
Espace réduit, anneaux, contention
A ciel ouvert, la prison dans son âme en perdition.
23/07/2010
A la proue, émerge le connétable.
Une vague brune chasse l'autre.
De l'horizon, une excroissance, une table,
Le navire danse emportant les apôtres
La silhouette entaillée se précise
Ocre, blanc et le vert végétal,
Une rumeur enfle sur le piédestal
L'ombre des frégates est la balise
Alors, au pied du roc unique
Mon regard enveloppe le cirque
Mille et encore mille cris, du ciel,
Message biblique, les oiseaux s'éveillent.
Clac, clac, bruit de becs
Trilles, trilles qui me vrillent.
Je contemple la colonie, ivresses sonores
Pillent, pillent, pirates qui ne cillent
Traquent, traquent le fruits des sacs
Je contemple la colonie, maîtresse de mon corps
Piquent, piquent les oiseaux sans éthique
Payent ou veillent le tribut sans pareil
Je contemple la colonie, prêtresse carnivore.
24/07/2010
Mon regard s'arrête
Sur une muraille verte
Mon regard pénètre
Les verts comme des lettres
Une fenêtre, les tons désunis
S'enchevêtrent sans une symphonie
Crêtes, lancéolée ou palmes réunies
Prêtres des chants, polyphonies.
25/07/2010
La barque glisse sur le miroir calme
La barque crisse entre les joncs et les palétuviers
L'aube pointe et rougeoie la trame
L'aube peinte et la Gabrielle à ses pieds.
La barque remonte le fil du lac Pali
La barque affronte l'indolente marée
Puis la forêt inondée, ensevelie,
Puis la forêt arque boutée et les palmiers
La barque s'épuise et fait silence
Un Ibis vert, un hoatzin dans une anse
Le Jacana trépigne, le cacique en colère
La barque arrive, il ouvre une bière.
26/07/2010
En partance, les souvenirs s'intensifient
Autrement sur une rive inexplorée
Le temps d'une vie, s'édifient
Les images d'un au delà rêvé.
Un fleuve brun, une île amère
Un désert rempli de vie, un cratère
Les rivages d'une mémoire remplie
Les mirages d'un espoir ou d'un oubli.
30/07/2010
Au bout des sables coquillés
Derrière la dernière jetée
Après l'ancien estuaire de la mana
Une maison hors du village Kalina
Il y a un homme seul avec ses pensées
Seul même avec son fils aimé
Seul même avec sa femme délaissée
Seul même avec les oiseaux à la marée
Le monde s'est déjà écroulé
Il lui reste une liste et ses doigts pour compter.
Une digue, deux rizières
Un sentier, deux rivières
Une prière, les oiseaux en gigues,
Une manière,
Je les observe pépier
Un signe, un regard en arrière
Une huppe, une hampe dans la lumière
Ou une crinière, un oiseau dans le zig
Sans barrière,
Je les observe me défier